RELIRE : BYRONICPUNK - Du fétiche et des sensations

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depuis Recon News

22 août 2020

Danny Thanh Nguyen, alias ByronicPunk, est connu pour son abilité avec les floggers et les fouets, et aussi pour ses écritures fictives et non fictives. Actuellement, il travaille sur un livre qui traite du fétiche, de la survie et des points parallèles entre la communauté cuir et fétiche et les réfugiés. Dans cet article, il parle du fait que souvent, les origines de nos fétiches ne sont pas les mêmes, mais qu'il peut être avantageux de regarder ces différences de plus près

Je trouve fascinant de voir comment les gens peuvent aimer les mêmes fétiches mais pour des raisons totalement différentes. Qu'il s'agisse de SM, de bottes et d'uniformes, de sports nautiques, de jeux puppy, peu importe - la somme des raisons derrière notre amour pour un fétiche particulier ne correspondra jamais à 100% aux raisons des autres fétichistes. C'est comme si nous étions un groupe de girouettes cochonnes et perverses.

Une fois, j'ai vécu une amourette d'été avec un cochon qui visitait San Francisco pour la saison. Nous venions de terminer une séance de fisting et nous étions allongés sur le lit, épuisés, trempés de sueur, et heureux. J'ai essuyé mes mains, qui étaient ridées à force d'utiliser du lubrifiant J-lube, et j'ai dit: « Bon travail. Tu as soumis ton trou du cul comme un champion. » Pour faire bonne mesure, j'ai pris une voix profonde comme Dom Daddy, pensant qu'il aimerait savoir que ça m'avait plu. Mais il leva un sourcil et me lança un regard confus.

« Soumis ? » dit-il. « C'était soumis, ça ? »

La conversation qui a suivi a révélé que, bien sûr, il aimait les jeux de dominance et soumission, mais pas quand il se faisait fister. « Pour moi, le fisting se focalise sur mon plaisir égoïste et sur mon intimité avec l'autre. C'est l'une des choses les plus intimes que je fais avec une autre personne. »

J'ai revu mentalement la séquence porno de notre session : la façon dont il a crié les jambes levées, mes grognements de plus en plus agressifs, la manière dégradante à laquelle on s'est parlés, une manière que personne en société n'utiliserait pour s'adresser aux gens qu'ils apprécient. Je pensais que nous buvions l'eau du même puits sombre au cours de ces dernières heures. Mais désormais, il était clair que la personne dominante que je m'étais créé pour le baiser avec mon poing n'existait que dans mon espace mental.

Il y a une différence entre savoir qu'une personne aime le fétichisme et savoir pourquoi elle l'aime. Je me souviens d'une conversation que j'ai eue avec un ami du bondage sur la raison pour laquelle nous aimons être attachés et suspendus au plafond comme si nous étions des piñatas super sexy. Bien que l'origine de notre attrait pour le bondage remontait à notre enfance, les ressemblances s'arrêtaient là. Étant enfant, j'aimais être emmitouflé au lit, les draps fourrés sous le matelas; je jouais à la lutte avec un voisin enrobé afin de pouvoir sentir son poids sur moi, comme une pâte à pain qui gonflait et qui m'enveloppait. Pour moi, le bondage est focalisé sur les sensations physiques - être serré, la compression, la façon dont les cordes sont clouées à mes bras et mes jambes, les engloutissant. Quand je fléchis mes muscles contre les cordes, j'entre dans cet espace de super-héros

Par contre, mon ami a grandi dans la culture militaire indonésienne et a pratiqué l'auto-bondage quand il était enfant. Il s'attachait aux chaises de cuisine avec du ruban adhésif pour recréer les scènes de torture des films de James Bond. Il s'attachait au sol et imaginait qu'il tentait d'échapper aux voleurs entrés par effraction dans sa maison. Son adrénaline érotique ne vient pas de l'esclavage physique, mais du sentiment psychologique d'impuissance que ça reflète. Lors des sessions, il se retrouve dans une zone de vulnérabilité, dans l'espace mental d'une victime captive avec la peur de ne pas pouvoir contrôler son corps ou son destin.

Deux hommes avec les mêmes moyens, mais à des fins différentes. C'est une chose normale, car nos sexualités sont supposées être dynamiques. Mais ce dynamisme pose un défi lorsqu'on essaie de jouer avec d'autres qui partagent nos fétiches : apprendre à aborder les textures et les nuances de nos désirs, voir comment ils se complètent ou s'alignent différemment.

Il est plus facile de comprendre intérieurement les fétiches que nous aimons, dans l'espace privé et nuageux des sentiments instinctifs, que de les exprimer ouvertement aux autres. Mais la sauce secrète d'une session dans laquelle on se connecte vraiment, c'est quand on se met au défi nous-mêmes et nos partenaires sexuels afin d'exprimer ce qui nous attire dans nos fétiches - en soulignant les intentions et les motivations spécifiques derrière eux.

Quelle est votre raison fondamentale pour devenir un chiot, et qu'est-ce que ça produit en vous ? Quelles sont les innombrables raisons pour lesquelles mettre un vêtement spécifique vous donne un sentiment de puissance ou vous permet de jouer d'une manière normalement impensable ? Pourquoi le fait de vous faire battre jusqu'à en avoir des ecchymoses vous apaise-t-il ?

Les questions à savoir si on a envie de quelque chose de fou et de ludique, ou de quelque chose de fort et tabou, ou sombre et effrayant, ou même de catharsis pour éliminer la colère ou les traumatismes, sont des outils de questionnement qui nous aident à peindre l'image complète de nos fantasmes. Ils peuvent nous aider à découvrir les détails et le contexte nécessaires pour atteindre la zone de plaisir égoïste et l'intimité mentionnées par mon amourette d'été. En creusant profondément dans ce que nous aimons, nous devenons de meilleurs négociateurs, plus responsables et capables de réaliser nos passions, ainsi que celles des autres.

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